Différents dans les techniques, dans les styles et dans l'expression, un point commun lie la céramiste Lut Brackx et le photographe Jean-Paul Gribaumont, l'approche. Elle témoigne d'une sincérité, d'un goût pour la simplicité d'une émotion qui fuse. Dire ou montrer, en une image, en un objet, ce qui demanderait un nombre indigeste de mots ou ce qui reste inexprimable verbalement.

Au risque de déjà vu ou de verser dans le mélodramatique, le terme ' regards ' pouvait nommer cette exposition. Non pas un regard, larme à l'œil, sur l'objet de ses convoitises ou celui de son désir mais un regard qui porte loin, à travers ce qui nous guide ou à la rencontre de nos dérives.

Ce regard…. Celui posé sur les choses et sur les gens. Celui aussi et inévitablement retourné sur nous-mêmes.
Il trahit les préjugés, les jugements, la critique ou le mépris… Mais également - ou plutôt inégalement - il traduit la tendresse, l'affection.

Ici, l'isolement d'un être face à ses rêves et ses démons. Contradictions d'une société où l'on consomme trop souvent plus qu'on ne raisonne. Souvent se croisent des sentiments, positifs et joyeux puis mélancoliques, sombres parfois. Le sourire arboré à la découverte visuelle de la matière se fige alors en angoisse… Si on aborde trop facilement, en tant que spectateur passif, une œuvre avec légèreté, c'est sans compter sur ce que nous dit cette œuvre. Le message que l'artiste projette, par la maîtrise d'une technique, demande la profondeur nécessaire dans la réflexion. Alors, ce regard, fil conducteur malgré lui, par l'effet de miroir, nous renvoie notre image. Celle que nous donnons et celle que nous ne voulons pas voir. Celle que nous portons sur le monde et sur ceux qui nous entourent.

Là, la mise à nu des personnages témoigne de la pureté de l'expression de ce que chacun de ces êtres créés, inventés, exprime du fond de lui-même. Débarrassés du superflu, ne reste que l'essence. à l'instar du matériau, seule couleur permise, outre les yeux, reflets bleus-verts de l'âme.
Un regard, sous sa forme la meilleure, se présente protecteur et rassembleur, témoigne la générosité et la chaleur de nos proches.

Pour l'un comme l'autre, les questionnements et satires d'une humanité déviante se fondent en plénitude de l'extase lorsque le regard abandonne le voyeurisme ou le narcissisme déplacés des uns pour se tourner vers l'horizon et ses nuages, là-bas, là-bas, les merveilleux nuages…. Il y a du Baudelaire dans l'air comme la poésie dénonciatrice et douce de ces deux artistes.